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lis tes ratures
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  • J'aime lire mais aussi écrire J'aime le livre, l'objet ; le toucher, le manipuler autant qu'il me manipule. J'aime le voyage, l'aventure des récits et les émotions qu'ils procurent et font émerger. J'aime les personnages. Que vive la littérature !
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27 mars 2020

Mal de mères suite 2

Ma chère Hortense,

Une semaine que j'ai posté ton précédent courrier et je n'ai pas trouvé vraiment un "bon" temps pour reprendre la plume. Il faut avouer que le soleil est de retour et que j'en profite pour faire de longues balades. En ville ou à la campagne entre deux patients, en début d'après-midi parfois car c'est l'heure de la sieste pour les plus âgés donc...c'est repos pour moi aussi et détente dès que possible. L'hiver a été pénible et chargé en tout, activités comme émotions. La disparition de Gilles nous a bien plombés. Son affaire suit son cours. Son attaque sur Paris a bien été commanditée d'ici mais a été exécutée par une bande des alentours de la capitale qui revendique son racisme et son homophobie. Gilles est convoqué au mois de mai pour une confrontation. Mr Josse et Mme Lilibeth se sont proposés pour l'accompagner. C'est marrant, on dirait comme des parents. L'association LGBT est en contact avec Mme Lilibeth et enverra deux soutiens le jour de la convocation. Gilles n'a plus de plâtre mais il reste très prudent. Sa jambe a fondu de moitié. Il va désormais à la piscine du centre de rééducation et Étienne le suit. Il demande de temps en temps à Aurore ou Margaux si personne de sa famille n'a appelé pour lui (il a perdu son portable lors de l'agression ou bien il lui a été volé, on ne sait pas). Comme à chaque fois, la réponse est négative, on dirait qu'il pleure à l'intérieur de lui. Dans ces moments-là, son regard se vide, s'absente. Ça ne dure pas car les filles ont l'habitude et le récupèrent grâce à une blague ou une boutade. Mais, on sait que ça le mine car lors des ateliers d'écriture, rares sont les textes longs qui n'ėvoquent pas d'une manière ou d'une autre son sentiment de rejet ou celui de culpabilité, une douleur en tout cas. Mais ça lui fait du bien l'écriture. Il ne craint plus de lire à haute voix car il se sent en confiance. Il a sympathisė avec Benjamin qui fait partie du groupe. Je te vois venir avec tes gros sabots chère Hortense !...Il ne s'agit que d'affinités et d'amitié. Bon, c'est vrai qu'Étienne m'a rapporté que Gilles aurait espéré autre chose. Mais Benjamin a été très direct avec lui. Il préfère les filles...définitivement. C'est la vie ! En attendant de trouver chaussure à son pied, il poursuit sa psychothérapie et sa rééducation. Il reprendra le travail sans doute en juin. Il se plaît dans son perchoir au dernier étage. Et ça plaît à Mme Lilibeth de le savoir là. C'est une vraie mère poule avec lui.

En ce moment, on ne voit le bout du nez de Mme Lilibeth qu'en milieu d'après-midi. Exceptées Margaux qui travaille dans le bureau situé dans son appartement à l'étage et Sarah la jeune fille qui fait le ménage, personne ne la voit en matinée. Margaux dit qu'elle est levée avant qu'elle même arrive mais qu'elle est déjà à son pupitre et écrit inlassablement. Elle fait une pause de temps à autre seule ou avec Margaux. Elles boivent un thé ou Mme lilibeth lui tire les cartes. D'ailleurs l'autre jour, Margaux était toute contente car les tarots lui ont dit...oui les tarots lui ont dit ...

"Vous démarrez le mois d'avril avec l'énergie de la tour. Tout s'écroule ! Tout ce qui n'est plus utile, qui vous entrave, est balayé de votre vie. Ça fait peur mais il y a du nouveau à venir. C'est sûrement la conséquence de l'hermite. Le chevalier de denier représente la lenteur et vous êtes rentrée dans votre grotte. C'est le chamboule-tout. Mais, le valet de denier représente la renaissance et le début de quelque chose."

Elle m'a expliqué que ça lui fait du bien. Pendant que Mme Lilibeth ou Aurore lui tirent les cartes, elle se laisse porter. Quelqu'un s'occupe d'elle. Elle compare ça à l'esthėticienne mais c'est à l'intérieur que ça se passe. Ça la détend et ça la guide aussi. Elle était très en colère fin mars mais elle dit que les cartes l'aident à garder l'espoir et à accepter ses émotions négatives. Elle a donc accueilli ses colères : sa colère contre son ex, contre sa famille, contre les amis du couple qui se sont presque tous tournés vers son ex, contre elle-même aussi. Elle s'en veut de ne pas avoir tenu compte des avertissements : ses deux grossesses seule avec son gros ventre et les problèmes, le côté séducteur du père  de ses enfants, qui indirectement la flattait, son autoritarisme qui n'était ni plus ni moins que la copie conforme de celui de son père, son mépris de ce qu'elle était, de ce qu' elle aimait, de ce qu' elle désirait.  Elle se reproche de ne pas être toujours digne et exemplaire, de ne pas être une femme parfaite, une mère parfaite. Elle a fait le vide autour d'elle tellement elle se sent perdue. Un jour gaie, un jour triste, un autre dans la maitrise, un autre encore en colère...Elle ne regrette nullement la rupture. Elle a été humiliée. Mais la blessure est à vif. Tout ce qui peut la soulager est le bienvenu. Voilà à quoi ça lui sert aussi  de se faire tirer les cartes...espérer et patienter. Ça ne règle rien mais ça l'accompagne.

Mme Lillibeth lui a proposé de prendre une semaine de congé au printemps mais elle a décliné. Le travail la sauve de ses angoisses me dit-elle. Elle consulte elle aussi, psycho et kinėsiologue. Elle se fait du bien autant que c'est possible. Chacun et chacune fait comme il peut. Un jour qu'elle disait à Mme Lilibeth que son corps la trahissait...Elle a obtenu en retour...non, Margaux, votre corps ne vous trahit pas...C'est vous qui le trahissez en ne l'écoutant pas !

Pause...Étienne rentre du travail...à pluche ma belle

Claire

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